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16 février 2023 | de Melissa Selb

Développement d’un modèle servant à mesurer l’efficacité de la réadaptation

Cet article décrit une approche de mesure ciblée et transparente de l’efficacité des prestations de réadaptation ambulatoires et stationnaires. L’approche tient notamment compte de l’optimisation de la capacité fonctionnelle (y c. capacité de travail) et sert de base de l’amélioration continue des prestations de réadaptation de la Suva.

Table des matières

Maren Hopfe a b, Melissa Selb a b c, Cristina Ehrmann b, Mirjam Brach b, Urban Schwegler a b, Barbara Schiffmann b, Carla Sabariego a b d, Gerold Stucki a b c d 

a Département sciences de la santé et médecine, Université de Lucerne
b Recherche suisse pour paraplégiques, Nottwil 
c ICF Research Branch, Nottwil 
d Centre de réadaptation en systèmes de santé globaux, centre de collaboration de
l’Organisation mondiale de la Santé, Université de Lucerne

Introduction

La Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (Suva) représente, avec env. 1,98 million de personnes assurées réparties entre 127 000 entreprises, la plus grande assurance-accidents de Suisse. Parmi ses principaux domaines, il y a la réadaptation, en plus de la prévention et de l’assurance. Avec la prévention et les soins, la réadaptation représente l’une des trois principales stratégies de santé du 21e siècle [1]. Elle englobe une prise en charge globale des personnes assurées pour leur permettre de reprendre leur vie quotidienne et leur activité professionnelle le plus efficacement possible[2]. Afin de garantir demain aussi des soins de réadaptation adaptés aux besoins des patientes et patients, la Suva a lancé en 2018 le développement et la mise en œuvre d’un système continu et standardisé de mesure de l’efficacité des prestations de réadaptation ambulatoires et stationnaires.

Selon la définition des sciences de la santé, «l’impact» englobe tous les changements ou résultats pouvant être attribués au sens très large du terme à la réalisation d’une prestation de santé [3]. Cela englobe à la fois les changements attendus et inattendus, visés et non visés, ainsi que positifs et négatifs. Il est possible de différencier le type d’impact (p. ex. économique, social ou politique), sa durée (à court terme, à moyen terme ou à long terme) et le niveau de manifestation (p. ex. patient·e, clinique, assurance, société). 

Au cœur du débat sur l’efficacité, il y a le thème de la garantie durable de soins adéquats, ciblés et efficaces à l’intention des patientes et patients (ci-après «patients») bénéficiant de prestations de réadaptation ambulatoires et stationnaires. Il convient de montrer de façon transparente avec quel résultat les fournisseurs de prestations remplissent leurs tâches à cet égard. Pour évaluer correctement l’impact d’une mesure de réadaptation, il faut, au-delà de la collecte d’indicateurs économiques et relevant de la gestion d’entreprise, tenir compte aussi des objectifs et des indications qui sous-tendent la prestation de réadaptation. 

Il y a tout un éventail d’objectifs de réadaptation. Ils vont de l’optimisation ciblée de la capacité fonctionnelle, du maintien de la capacité de rendement, du développement d’aptitudes pour faire face aux exigences professionnelles jusqu’à la reprise de la vie professionnelle en passant par le fait d’éviter une atteinte durable de la participation et un départ prématuré de la vie active [4]. Il est important dans ce contexte de pouvoir obtenir un impact par rapport à la prestation de réadaptation. En conséquence, l’efficacité de la prestation de réadaptation doit être considérée comme un changement par rapport à la situation initiale (avant le début de la prestation de réadaptation).

Pour mesurer l’efficacité des prestations de réadaptation, on prend comme point de départ la définition de variables déterminantes, qui fournissent des informations pour une optimisation du ratio coût-efficacité et sont adaptées à l’approche biopsychosociale prédominante dans la réadaptation [5]. Des expertes et experts de l’Université de Lucerne ont, en étroite collaboration avec la Suva, développé un modèle théorique de mesure de l’efficacité des prestations de réadaptation, devant être présenté dans cet article. 

Le modèle développé constitue un système ouvert et évolutif, qui permet d’évaluer périodiquement le développement du succès de la réadaptation, de le comparer à celui de la période précédente, et le cas échéant de planifier et de mettre en œuvre des mesures d’optimisation. Le modèle repose sur des connaissances spécialisées et les dernières données probantes de la recherche dans le domaine de la réadaptation. Dans le cadre de ce modèle, il n’a pas été possible d’évaluer l’impact d’autres prestations fournies en milieu clinique, comme l’établissement d’expertises médicales, car cela requiert une analyse juridique de l’impact. 

Modèle de mesure de l’efficacité des prestations de réadaptation de la Suva

La mesure de l’efficacité des prestations de réadaptation de la Suva repose sur le Logic Model, qui est largement répandu dans le développement de modèles d’impact [6]. De façon simplifiée, il représente une chaîne d’impacts, qui permet de montrer les différents niveaux d’impact et leurs interdépendances.  

Le présent modèle d’impact servant à mesurer les prestations de réadaptation ambulatoires et stationnaires repose sur les niveaux de réaction facteurs d’entrée, input, output, outcome et impact (voir illustration 1). La situation du patient et ses indications individuelles pour une réadaptation avant le début de l’épisode de réadaptation sert de point de départ de la mesure de l’efficacité. Dans le modèle d’impact, cette situation est représentée par les facteurs d’entrée. Sur cette base, le modèle d’impact décrit quelles prestations de réadaptation (input) sont utilisées pour obtenir un changement ou un effet (output), qui est directement mesuré à la fin des prestations reçues. Il y a donc un lien direct entre l’output et les prestations de réadaptation (input) fournies à l’intérieur d’un épisode de réadaptation. Ces niveaux de réaction seront décrits en détail dans la suite de cet article.

Tabelle

Niveaux de réaction du Logic Model, qui sous-tend le modèle de mesure de l’efficacité des prestations de réadaptation.

L’objectif d’une mesure en continu de l’efficacité des prestations de réadaptation dans le contexte de la Suva sous-tend le Logic Model. Ces prestations ne sont pas fournies selon un déroulement temporel standardisé et peuvent avoir lieu juste après le traitement dans un hôpital pour soins aigus, mais aussi des années après un accident. Les patients peuvent passer par plusieurs épisodes de réadaptation chez différents fournisseurs de prestations. Pour tenir compte de cette complexité temporelle de la fourniture de prestations et pour garantir une mesure ciblée et transparente de l’impact pour chaque prestataire, le présent modèle d’impact est basé sur des épisodes de réadaptation qu’il faut considérer indépendamment de l’accident en tant qu’événement sur le plan temporel. Le modèle d’impact englobe la phase de planification et de coordination précédant un épisode de réadaptation, où intervient l’évaluation de la réadaptation, l’épisode de réadaptation lui-même, lors duquel sont fournies les prestations, et l’épisode suivant la fourniture des prestations de réadaptation (après l’épisode de réadaptation). Voir illustration 1. Ce dernier épisode peut être indicatif de la durabilité des prestations de réadaptation fournies. Récemment, un Logic Model transversal de monitorage et d’évaluation des prestations de réadaptation a été publié dans une revue internationale [7]. 

Comment les objectifs centraux de la réadaptation peuvent-ils être représentés?

Le principal objectif de la réadaptation est de recouvrer ou d’optimiser la capacité fonctionnelle de personnes et leur capacité à participer à la vie sociale, ainsi que de réduire leur expérience du handicap [8, 9]. L’amélioration de la capacité fonctionnelle et de la participation devrait ainsi être mise en œuvre comme un indicateur d’impact central pour mesurer l’efficacité des prestations de réadaptation ambulatoires et stationnaires [10].  

La Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF) de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) constitue le système de référence de l’évaluation, de la description et de la documentation standardisées de la capacité fonctionnelle, et elle soutient la mesure ciblée, parlante et transparente de l’efficacité des prestations de réadaptation. La conception multidimensionnelle de la CIF voit la capacité fonctionnelle comme le résultat de l’interaction entre différentes composantes de la santé, parmi lesquelles les fonctions corporelles et les structures corporelles, les activités et la participation, ainsi que les facteurs d’influence potentiels axés sur l’environnement et les personnes. La CIF se compose de catégories, qui décrivent les composantes susmentionnées ainsi que les facteurs environnementaux. Cela permet de décrire une personne présentant une atteinte à la santé de façon orientée vers les ressources et neutre sur le plan de l’étiologie [11, 12]. 

Pour pouvoir représenter la capacité fonctionnelle de façon orientée vers le patient, il est nécessaire d’identifier les catégories déterminantes. Pour mettre en pratique la CIF, différentes listes de catégories CIF propres au diagnostic et au contexte, appelées «ICF Core Sets», ont été développées au moyen d’une procédure en plusieurs étapes [13, 14]. Pour évaluer et documenter la capacité fonctionnelle du patient en réadaptation indépendamment de son diagnostic ou de son problème de santé, la liste «ICF Generic-30 Set» a été développée [15]. Elle englobe 30 catégories des composantes fonctions et structures corporelles, activités et participation (voir tableau 1). 

Les cliniques de réadaptation suisses utilisent actuellement à la fois l’indice de Barthel étendu (IBE) et la Functional Independence Measure (FIM) comme instruments d’évaluation standardisée de la capacité fonctionnelle du patient lors de son admission à la clinique et de sa sortie. L’IBE et la FIM évaluent le degré de dépendance par rapport à l’aide d’une tierce personne et servent à documenter le travail de soins pour les patients atteints dans l’accomplissement des actes de la vie courante [16, 17]. En plus de l’IBE et de la FIM, d’autres instruments d’évaluation clinique sont utilisés dans la pratique quotidienne pour documenter les progrès du patient dans le domaine de la réadaptation. L’application de «linking rules» vérifiées scientifiquement permet de relier les items de ces instruments et ceux de l’IBE et de la FIM avec les catégories de la CIF qui leur correspondent [18]. Cela permet d’identifier quelles catégories CIF se présentent dans ces instruments, et quels items sont comparables en raison des catégories CIF communes. 

L’IBE et la FIM représentent bien la dépendance par rapport à des moyens auxiliaires ou à des auxiliaires ou tout changement survenu dans la situation de dépendance, notamment pour les cas graves. Les cliniciennes et cliniciens ont toutefois remis en question leur aptitude à décrire la capacité fonctionnelle des personnes présentent des troubles moins graves. La liste ICF Generic-30 Set est la plus complète et elle couvre des aspects importants de la capacité fonctionnelle comme le niveau d’énergie, la douleur, le sommeil et les activités de la vie courante [19]. Sur la base de la liste ICF Generic-30 Set, un outil clinique a été développé, le «ClinFIT» [20]. Contrairement à la FIM et à l’IBE, l’échelle d’évaluation de ClinFIT s’appuie sur l’étendue du problème, et pas seulement sur la dépendance, ce qui peut être utile pour les cas moins graves. Il s’est avéré dans les études que ClinFIT était utile pour évaluer la capacité fonctionnelle en réadaptation ambulatoire [19] et stationnaire [21, 22], ainsi qu’à des périodes différentes et pour des patients présentant des diagnostics divers [23]. Une mesure ciblée, parlante et transparente de l’efficacité des prestations ambulatoires et stationnaires de réadaptation dans le contexte de la Suva devrait donc s’appuyer sur la norme ICF Generic-30 Set afin de garantir une représentation fiable et globale de la capacité fonctionnelle des patients. Pour pouvoir appliquer la norme ICF Generic-30 Set pour mesurer l’efficacité des prestations de réadaptation, il est nécessaire de rendre opérationnelles les catégories CIF en les associant à des scores. 

 
ICF Code Titel 
b130 Fonctions de l’énergie psychique et des pulsions
b134 Fonctions du sommeil
b152 Fonctions émotionnelles
b282 Douleur
b455 Fonctions de la capacité de charge cardiorespiratoire
b620 Fonctions de la miction 
b640 Fonctions sexuelles
b710 Fonctions de la mobilité des articulations
b730 Fonctions de la force musculaire
d230 Réaliser les actes de la vie courante
d240 Gérer le stress et les autres difficultés psychiques
d410  Changer de position de base du corps
d415  Garder une position corporelle
d420 Se déplacer
d450  Marcher
d455  Se déplacer autrement
d465 Se déplacer en utilisant des appareils/équipements spéciaux
d470  Utiliser un moyen de transport
d510  Se laver
d520 Prendre soin de parties de son corps
d530 Aller aux toilettes
d540 S’habiller
d550 Manger
d570 Faire attention à sa santé
d640 Faire les devoirs
d660 Aider les autres
d710 Interactions de base avec autrui
d770 Relations intimes
d850 Activités rémunérées
d920 Récupération et loisirs

Tableau 1: Aperçu ICF-Generic-30 Set 

Comment représenter la réadaptation professionnelle?

En plus d’une réadaptation médicale réussie, les prestations de réadaptation soutenues par la Suva poursuivent notamment l’objectif d’un retour réussi sur le marché du travail. La réadaptation professionnelle représente une prestation de réadaptation centrale. Elle englobe toutes les prestations médicales, psychologiques, sociales et professionnelles qui poursuivent l’objectif de permettre aux personnes ayant subi un accident de recouvrer leur capacité de travail et ainsi de créer la condition nécessaire à une reprise du travail dans l’emploi d’origine ou à un poste adapté [24]. Elle est un maillon nécessaire entre la réadaptation médicale et le monde du travail et doit donc être impérativement prise en compte dans la mesure de l’efficacité des prestations de réadaptation.

Pour mesurer l’efficacité d’une réadaptation professionnelle, il est à la fois essentiel d’évaluer la capacité fonctionnelle professionnelle et celle de la participation professionnelle. La capacité fonctionnelle professionnelle donne une impression générale des limitations fonctionnelles dans l’accomplissement des tâches professionnelles aux niveaux des fonctions corporelles, des structures corporelles ainsi que des activités et de la participation. Pour la rendre opérationnelle, il est possible de se servir du Work Rehabilitation Questionnaire (WORQ) (https://www.myworq.org) [25-28]. La capacité de participation professionnelle décrit la capacité d’une personne à satisfaire aux exigences spécifiques (accomplir les activités professionnelles) de son poste. Elle peut être représentée par un profil de job matching, qui se rapporte à la description de l’activité de la personne (profil d’exigences) [29].  

Composantes déterminantes pour mesurer l’efficacité

Pour le présent modèle, seules des variables qui sont significatives pour mesurer l’impact dans le contexte de la Suva ont été prises en compte. La sélection correspondante repose sur des données probantes scientifiques récentes [30, 31] et elle a été discutée avec des spécialistes expérimentés des sciences de la réadaptation. 

Facteurs d’entrée

Pour pouvoir évaluer un changement dans le sens de l’impact des prestations de réadaptation, il est nécessaire de représenter de façon globale et fiable la situation initiale, qui correspond à la situation médicale, professionnelle et sociale du patient avant le début de l’épisode de réadaptation correspondant. Ces informations peuvent à la fois être collectées avant le début de l’épisode de réadaptation (phase de planification et de coordination), ou directement au début de l’épisode de réadaptation. 

Les facteurs d’entrée se subdivisent en quatre groupes: facteurs médicaux, facteurs professionnelles, facteurs sociaux et autres facteurs. Pour les facteurs médicaux, les troubles de la santé, saisis sous la forme d’indices ou de codes de la Classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes (CIM) [32], représentent une partie du corps blessée, le nombre de régions du corps blessées et le groupe de régions du corps blessé ainsi qu’une autre/que d’autres morbidité(s) lié(s) au cas, autant de variables déterminantes quant à l’impact. Il est essentiel d’évaluer solidement le trouble de santé sous-jacent et de définir un indice pour la réadaptation. De plus, il est nécessaire d’évaluer la capacité fonctionnelle, conformément à la description ci-dessus. Une évaluation sur la base de la liste ICF Generic-30 Set est proposée à moyen terme afin de garantir une représentation valide et globale de la capacité fonctionnelle. L’évaluation de l’anamnèse médicale ou de l’historique de la réadaptation (p. ex. épisodes de réadaptation précédents), les prestations médicales fournies antérieurement (p. ex. opération dans un hôpital pour soins aigus, etc.) et les comorbidités existantes sont également des facteurs d’entrée médicaux déterminants. 

Les variables pertinentes pour saisir et évaluer l’impact de la réadaptation professionnelle figurent sous les facteurs professionnels. Il est recommandé de rendre les variables opérationnelles grâce au questionnaire WORQ et à un outil de job matching [29]. Les facteurs professionnels englobent aussi les variables pourcentage de capacité de travail, versement de prestations de l’AI et contrat de travail existant, qui sont des prédicteurs essentiels d’un retour réussi sur le marché du travail. 

Les facteurs sociaux englobent d’une part les variables sociodémographiques standardisées comme l’âge, le sexe, le lieu de résidence, l’éducation et le cadre de vie/les conditions de logement, et d’autre part les ressources psychologiques de la personne ainsi que la connaissance de la langue parlée dans un milieu de travail. Les ressources psychologiques englobent par exemple l’auto-efficacité ou l’orientation sur les objectifs d’un patient. Il est important qu’une opérationnalisation adéquate soit à la base des ressources psychologiques. 

Tabelle

Tableau 2: Aperçu du modèle d’impact avec toutes les variables déterminantes quant à l’impact; IT = incapacité de travail, ∆ = delta

 

Pour orienter les patients de façon ciblée vers des prestations de réadaptation, il convient d’examiner avec soin les indicateurs de réadaptation sur la base du constat de la nécessité de réadaptation (si la participation à la vie sociale est menacée par un déclencheur compromettant pour la santé ou si elle est déjà limitée), de la capacité à se réadapter (capacité, compte tenu de la constitution physique et psychique du patient, à pouvoir et à vouloir solliciter des prestations thérapeutiques), des résultats prévus de la réadaptation et des objectifs de réadaptation [33]. Il est proposé d’intégrer l’examen de la nécessité de réadaptation et de la capacité à se réadapter (selon le critère «effectué/non effectué») dans la mesure de l’efficacité en tant que facteurs d’entrée spéciaux. Les résultats prévus de la réadaptation peuvent entre autres être rendus opérationnels grâce à la durée de l’incapacité de travail ou à la modification de la capacité de travail. Les objectifs de réadaptation devraient être intégrés dans la mesure de l’efficacité, à la fois sous la forme de l’évaluation «effectué/non effectué» et sous la forme d’objectifs mentionnés concrètement sur la base de normes nationales, comme les objectifs de participation ANQ. L’évaluation des prescripteurs (p. ex. hôpital pour soins aigus ou autre clinique de réadaptation), qui doit fournir des indications permettant de contrôler les processus d’orientation, est également importante pour mesurer l’efficacité. 

Input

Toutes les variables qui ont un lien direct avec la fourniture de prestations et qui de ce fait représentent les prestations thérapeutiques et diagnostiques fournies peuvent être considérées comme des variables déterminantes quant à l’impact au niveau de l’input. Celles-ci peuvent être saisies sur la base de la Classification suisse des interventions chirurgicales (CHOP) ou des codes d’intervention  ou d’informations relatives aux prestations supplémentaires convenues. De plus, il faudrait saisir des informations sur le fournisseur de prestations (nom de la clinique, type de clinique/spécialisation, canton, prestations ambulatoires/stationnaires et mandat de prestations cantonal).

Output

Les variables de l’output se rapportent à l’évolution des facteurs médicaux (trouble de la santé et capacité fonctionnelle) et des facteurs professionnels (capacité fonctionnelle professionnelle et capacité de participation professionnelle) juste après la fourniture de prestations. Afin de garantir la comparabilité de la situation de départ avec l’état de santé juste à la fin de l’épisode de réadaptation, il faut avoir accès aux mêmes variables, qui doivent avoir été rendues opérationnelles de façon homogène. La variable «autre(s) morbidité(s) lié(e) au cas» permet de représenter une éventuelle extension des symptômes et la présence durable de maladies, comme un syndrome de douleur généralisé. 

Outcome

Les variables du niveau d’efficacité relatif à l’outcome ont un lien indirect avec la prestation de réadaptation, et elles sont collectées plus tard, une fois que l’épisode de réadaptation est terminé. Cela englobe les coûts des prestations allouées Dans ce contexte, il est également important de saisir la durée de l’épisode de réadaptation. En ce qui concerne la Suva, d’autres variables économiques entrent encore en ligne de compte, comme les indemnités journalières, la rente d’invalidité, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité et l’allocation pour impotent. Comme le retour sur le marché du travail est un objectif central dans le cadre des prestations de réadaptation de la Suva, il faudrait également évaluer en tant qu’outcome la capacité fonctionnelle professionnelle et la capacité de participation professionnelle. Tandis que la collecte de ces variables en fin de réadaptation décrit la situation suivant immédiatement la fourniture des prestations de réadaptation, la saisie de ces mêmes variables pour l’outcome montre où en sont la capacité fonctionnelle professionnelle et la capacité de participation professionnelle du patient à la fin des prestations de réadaptation. Cela peut fournir des indications importantes pour mettre en place des interventions de suivi, par exemple des mesures de job coaching. De plus, il faut tenir compte de la capacité de travail en pour cent et du nombre de jours d’incapacité de travail. Il convient d’observer qu’une détérioration de l’outcome professionnel ne s’explique pas forcément par les prestations de réadaptation fournies, et qu’elle peut plutôt être influencée par des facteurs qui échappent au contrôle du fournisseur de prestations (p. ex. problèmes familiaux). Néanmoins, ces variables saisies en tant qu’outcome donnent une indication importante de la durabilité de la réadaptation. 

Impact

L’impact décrit les effets à long terme sur le micro-niveau, le méso-niveau et le macro-niveau. Les variables du niveau relatif à l’impact ont uniquement un lien indirect avec la prestation de réadaptation, et elles ne sont donc pas directement dues à la réadaptation effectuée. À ce niveau, il faudrait au minimum saisir les variables du micro-niveau, comme la qualité de vie ou la reprise durable du travail, dans la mesure où une absence de retour au travail ou une intégration professionnelle non durable peut une fois encore avoir un impact sur la santé [34-37].
Une autre variable déterminante quant à l’impact, fréquemment citée dans le contexte de la réadaptation, est le degré de réalisation des objectifs de réadaptation, tant d’un point de vue clinique que dans la perspective du patient. Il convient encore de développer une opérationnalisation des objectifs qui soit valide, indépendante et utilisable sur le plan clinique.  

Remarque finale

Pour garantir une mesure ciblée de l’efficacité de la prestation de réadaptation, il est recommandé d’intégrer les informations relatives à l’évolution de la capacité fonctionnelle à l’aide de ICF Generic-30 Set/ClinFIT. Cette recommandation a été mise en œuvre dans un projet pilote [38], qui a été réalisé par la Suva en tant que projet de faisabilité, en collaboration avec l’Université de Lucerne, dans les cliniques de réadaptation de la Suva (Rehaklinik Bellikon et Clinique romande de réadaptation Sion). 

Pour garantir une représentation valide et complète de l’efficacité de la réadaptation professionnelle, qui constitue une partie importante des prestations de réadaptation allouées par la Suva, il est recommandé de mettre en œuvre le questionnaire WORQ. Ce dernier a également été utilisé dans le projet pilote mentionné pour compléter la collecte de données avec ICF Generic-30 Set/ClinFIT. La prise en compte de ce fait possible de la capacité fonctionnelle professionnelle a beaucoup d’impact sur la pertinence de la mesure de l’efficacité des prestations de réadaptation dans le contexte de la Suva. De plus, pour tenir compte de la capacité de participation professionnelle, il est recommandé d’utiliser un outil de job matching. 

La mesure de l’efficacité des prestations de réadaptation devrait de préférence être basée sur un modèle comportant des épisodes de réadaptation, et elle ne devrait pas exclusivement être mise en rapport avec le moment de l’accident.

L’approche proposée permet une mesure ciblée, parlante et transparente de l’efficacité des prestations de réadaptation ambulatoires et stationnaires, et elle sert de point de départ pour améliorer continuellement les prestations de réadaptation des personnes assurées à la Suva. 

Adresse de correspondance

Professor Gerold Stucki
Département des sciences de la santé et de médecine, Université de Lucerne

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